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vendredi 20 août 2021

Les Chinois à Montargis dès 1913, les uns au Collège Gambetta, d'autres à l'usine Hutchinson

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Un demi-siècle après le passage des Chinois par Montargis, alors que l’histoire est tombée dans l’oubli, on va découvrir que le successeur de Mao, Deng Xiaoping, a lui aussi vécu dans le Loiret…

Quasiment oubliée en France, l’histoire des Chinois de Montargis resurgit en 1975 lors de la visite en France  du Vice-Premier Ministre chinois, Deng Xiaoping, quand celui-ci demande à visiter Montargis où il aurait vécu au début des années 1920 !  

Côté français c’est la surprise. Deng Xiaoping a beau évoquer son travail à l’usine Hutchinson, dans les archives de l’entreprise, aucune fiche de travail ne répond à son nom. On en reste là. 

Deng Xiaoping, l’habitant oublié de Montargis.


Puis en 1982, le maire de Montargis, Max Nublat, est invité en Chine avec des maires de grandes villes de France, surpris de voir le représentant de cette modeste sous-préfecture du Loiret convié à ce voyage.

À Pékin, une banderole attend le maire de Montargis pour lui souhaiter la bienvenue ; 

c’est le seul membre de la délégation à avoir droit à cet honneur.

Et l’histoire ne s’arrête pas là : Max Nublat aura même droit à un entretien privé avec Deng Xiaoping, devenu le successeur de Mao, qui évoquera ses souvenirs montargois. 

Le fin mot de l’histoire ? 

Quelques passionnés vont s’apercevoir qu’au moment de son passage par Montargis Deng Xiaoping ne s’appelait pas encore Deng Xiaoping : il utilisait encore son nom de naissance….

 Et sur sa fiche de travail retrouvée, on peut lire : « A refusé de travailler, ne pas reprendre ».

 De cette époque date le début de l’engagement militant de Deng Xiaoping.

 

Deng Xiaoping a séjourné en France dans sa prime jeunesse ; quand il est parti, il était au sortir de l’enfance, à son retour il savait déjà ce qu’il allait faire de sa vie au service de son pays et de ses compatriotes. (Discours du Président chinois, Hu Jintao, pour le 100ème anniversaire de la naissance de Deng Xiaoping en 2004)

Aujourd’hui encore, les liens restent forts.

Depuis 2005 un circuit commémoratif des Chinois à Montargis rend hommage à l’histoire.

En 2014, une place Deng Xiaoping a été inaugurée à Montargis, suivie, en 2016, par un Musée Historique de l’Amitié Franco-Chinoise.

Le Lycée en Forêt à Montargis enseigne depuis de nombreuses années le mandarin et des échanges sont réalisés avec le lycée n°1 de Changsa, capitale de la Province du Hunan.

Et les choses pourraient encore s’accélérer puisque l’université Tsinghua de Pékin, 1ère université chinoise, envisageait, avant la crise sanitaire, d’ouvrir une antenne à Montargis. Affaire à suivre. 

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Réécouter Archive INA : Jean Joubert lit un extrait de son ouvrage "Les sabots rouges", sur la description d’un atelier d’une usine de pneus et caoutchouc de Montargis en 1936 (France Culture, "Un livre, des voix" de Pierre Sipriot, 19.07.1979)57 SEC

Archive INA : Jean Joubert lit un extrait de son ouvrage "Les sabots rouges", sur la description d’un atelier d’une usine de pneus et caoutchouc de Montargis en 1936 (France Culture, "Un livre, des voix" de Pierre Sipriot, 19.07.1979)


Montargis (06 au 10.07.1920) : CAI Hesen et son amie XIANG Jingyu exposent à leurs compatriotes leur thèse pour "sauver la Chine et le Monde". 

Historiquement, ce sera le véritable point de départ de la Chine Nouvelle

• Crédits : "Amitié Franco-Chinoise", association et musée historique

Remerciements à WANG Peiwen, présidente de l'association Amitié Chine-Montargis, pour les photos qui nous ont permis d'illustrer ces pages.

Un documentaire de Sacha Corso, réalisé par Vincent Decque. Archives INA, Manuela Dubessy. Avec la collaboration d'Annelise Signoret de la Bibliothèque de Radio France et Mewen de Maqueville, stagiaire.

Archives diffusées : Conférence de presse du Général De Gaulle (31.01.1964) - France Inter (12.05.1975) - Reportage télévisé Le Voyage Rouge (émission L’'Enquête au Centre sur France 3 Val-de-Loire)

Dang Xiaoping a rappelé tous ses souvenirs ici : L’apprentissage de la danse, la montée en vélo, le plaisir des croissants. […] Deng Xiaoping a aussi rappelé à Max Nublat, que c’est à Montargis, finalement, qu’il a fait ses premières armes communistes. Jean-Louis Rizzo

Bibliographie

Il y a débat mais il y a l’Histoire. […] C’est une horreur ce qui s’est passé à Tian’anmen, je le sais. Cette place, elle existe, c’est la place de la gare, et personne n’y habite donc personne ne reçoit une lettre à la place Deng Xiaoping. 

C’était la place où il est arrivé à Montargis donc c’est un clin d’œil à l’Histoire mais ce n'est pas une prosternation. 

Benoît Digeon, à propos de la place Deng Xiaoping à Montargis: "À la mémoire de DENG Xiaoping, ancien grand dirigeant de la République populaire de Chine, venu étudier et travailler dans le Montargois, dans les années 1920".

 Crédits : "Amitié Franco-Chinoise", association et musée historique à Montargis

Pour aller plus loin

Réécouter Yan Pei-Ming : "Ce qui m'intéresse dans le noir et blanc, ce sont les jeux de lumière"56 MIN

Yan Pei-Ming : "Ce qui m'intéresse dans le noir et blanc, ce sont les jeux de lumière"

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MONTARGIS, La Chinoise

Après la mort de Mao, qui se souvient de la place qu'a occupée Montargis dans la naissance du parti communiste chinois ?

Sans doute d'abord les protagonistes eux-mêmes, et à commencer par Deng Xiaoping.

Lors de son retour en France en 1975, cette fois en visite officielle, l'ancien étudiant souhaite revoir Montargis et "[y] manger des croissants" !

Ce voyage emprunt de nostalgie n'aura jamais lieu mais son ancien employeur, la multinationale Hutchinson, retrouve la trace de son passage dans les années 20.

Il s'agit d'une fiche archivée. Par ailleurs, Deng Xiaoping n'aura de cesse de rappeler l'importance de cette petite ville du Loiret dans l'Histoire de la Chine moderne. 

En 1982, la France, socialiste depuis un an (et avec des ministres communistes au gouvernement), forme de grands espoirs au sujet de ce gigantesque pays, "sur le point de s'éveiller".

Ce dernier est en passe de respirer après plusieurs décennies de guerres civiles, d'une révolution culturelle terrible, de programmes politico-économiques lancés à la hussarde et de purges au plus haut sommet de l'État.

Des millions de morts ont accompagné la mue de cette région du monde. 

Deng Xiaoping, l'ancien petit ouvrier de Montargis est à la tête de l'État et s'apprête à le moderniser contre vents et marées.

Le "Socialisme à la chinoise" se voit mâtiner d'un libéralisme a priori contre-nature, ce qui ne semble pas troubler outre-mesure le pragmatique Deng : "Peu importe qu'un chat soit blanc ou noir, le plus important est qu'il puisse attraper des souris", affirme-t-il avec conviction. 

Un voyage officiel est organisé en cette année 1982, rassemblant maires de grandes villes et industriels influents. Deng Xiaoping met une condition à ce voyage : que parmi les invités crânement présents figurent Max Nublat, le modeste maire (communiste) de Montargis. 

La journaliste Sylvie Braibant raconte avec verve et talent cet événement digne d'un film :

 "Max Nublat (...) fit sa valise, grimpa dans l'avion réservé à l'imposante suite française, fut placé un peu derrière les autres.

Après l'atterrissage et alors que tous s'apprêtaient à descendre, des officiels chinois pénétrèrent dans la carlingue, très affairés, et demandèrent à tout le monde de se rasseoir, à l'exception de "Monsieur le maire de Montargis".

Très étonné, et même légèrement inquiet, il passa donc devant tout le monde : au bas de la passerelle, sous une banderole de bienvenue déployée à son nom, une somptueuse limousine attendait. Il fut embarqué toutes sirènes hurlantes vers le Palais impérial.

Là, les portes s'ouvrirent les unes après les autres. Dans la dernière pièce, un homme attendait tout sourire et les bras ouverts.

Deng Xiaoping dit "dans mes bras Monsieur le maire de Montargis" et il serra bien fort contre lui un Max Nublat au bord d'une double apoplexie, physique et psychique."

 

Ému et nostalgique, Deng Xiaoping se souviendra longtemps d'anecdotes survenus cinquante ans plus tôt à Montargis : l'apprentissage de la valse dans un dancing, La Gloire (devenu un hôtel et restaurant étoilé), un PV récolté pour le non-fonctionnement du feu rouge d'un vélo ou le souvenir d'une collègue d'atelier aux yeux de couleurs différentes : "Impossible qu'il ne soit pas allé à Montargis", témoignera le maire de l'époque après coup.

 

Trente années se sont passées depuis cet événement diplomatique.

Après la mort de Deng Xiaoping en 1997, les relations étroites entre la Chine et Montargis ne sont pas laissées lettre morte, loin s'en faut.

Difficile à placer sur une mappemonde, la petite ville du Loiret tente cependant de cultiver cet héritage, non sans arrière-pensée économico-touristique.

Timidement, des initiatives se font jour pour capitaliser sur les relations sino-montargoises : circuit touristique, musée de la Chine au 15 rue du Tellier (anciennement 15 rue du Pont de l'Ouche, un site qui avait servi de résidence à de jeunes Chinois), manifestations culturelles sous l'égide d'une ambitieuse association Amitiés Chine-Montargis et de sa charismatique présidente, Peiwen Wang.   

 

Comment conclure cette série d'article sur les liens hors normes qui unissent une modeste ville française et une superpuissance ?

Peut-être en évoquant un dernier protagoniste.

 

René Dumont, candidat aux élections présidentielles de 1974, était le fils de la directrice du collège du Chinchon, un des lieux d'accueil d'étudiants chinois.  

Du même âge que Deng Xiaoping, "l'homme au pull-over rouge" se lia d'amitié avec Cai Chang, agronome réputée et future vice-présidente de l'Assemblée nationale de son pays.

Plus de cinquante ans après la venue de Li Shizheng, venu en France étudier l'agronomie, c'est René Dumont qui entreprend plusieurs voyages en Chine sur le même sujet.

Il constate là-bas les évolutions agricoles de la réforme agraire chinoise de 1949, non sans naïveté ni aveuglement d'ailleurs ("Saluons le dévouement des dirigeants chinois à l’intérêt national et à celui des travailleurs", écrit-il).

Il en retire des enseignements sur l'agronomie marxiste ("Une autre politique de développement existe déjà, dans le pays le plus peuplé du monde, qui permet une croissance mesurée certes, mais sans aide extérieure, sans chômage, sans gaspillages, avec très peu de pollutions : celui de la Chine").

Il en vient à affirmer, en utopique patenté, ses convictions sur la nécessité d'une révolution mondiale... écologique. 

Ce voyage d'un Montargois dans le pays de Deng Xiaoping, avec en arrière-fond l'agronomie chère à Li Shizheng, peut être lu comme un formidable pied de nez du destin.

C'est aussi une manière fascinante de boucler la boucle de cette aventure humaine, sur fond de révolutions.

 

Un remerciement particulier à Peiwen Wang

Sylvie Braibant, "De Montargis à Pékin : le grand bond en avant", janvier 2013
Jérôme Perrot, "
Montargis, l'étape secrète de la Révolution chinois", Humanité Dimanche, 16-22 octobre 2014

Régis Guyotat, "Montargis, berceau de la Chine nouvelle", Le Monde, 9 septembre 2006 
Alexandre Moatti, "René Dumont : les Quarante ans d'une Utopie", La Vie des Idées, 11 juillet 2014
Association Amitié Chine-Montargis
Musée de la Chine, 15 rue Tellier, Montargis

Voir aussi les deux articles précédents :
Montargis la Chinoise [1] : Naissance d'une idée
Montargis la Chinoise [2] : Deng Xiaoping et d'autres jeunes gens ambitieux

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